Que ceux qui crachent contre la pluie
prennent le premier TGV pour le sud
et qu’on n’en parle plus.
La pluie c’est merveilleux,
Ça révèle des abris comme le dit
le personnage de L’amoureux en lambeaux
épuisé d’amour, épuisé tout court,
La pluie ça permet de courir plus fort
vers un rendez-vous
Ou bien de se caler sous un auvent
et de réfléchir
à l’éventualité de déguerpir en arrière
pendant qu’il en est (encore) temps
Il y a le corps diplomatique qui éclabousse de rire
la jolie rousse de la rue du Dragon
et les standardistes de l’hôtel Millésime
rue Jacob qui ont les cheveux bien attachés,
La pluie ce sont les rues où l’on parle anglais couramment,
et je préfère toujours les filles qui ont l’air perdu sous un parapluie
que celles qui sont pleines de morgue et d’assurance en maillot de bains
ou sur un fil instagram qui, certains jours,
est aussi quiche qu’une plage privée au mois d’août
La pluie contient sa propre musique
qui n’est pas celle qui se crache à la radio,
ni celle dont se félicitent ceux qui produisent ou chantent des inepties,
des trucs vulgaires qui rentrent dans votre oreille sous le vernis de la nouveauté,
mais qui ne laisseront pas plus de souvenir qu’une nuit passée avec une sorcière
à l’épaule dévêtue.
Chaque fois qu’il pleut je m’en veux d’être prisonnier d’un bureau, d’une conversation,
ou d’une salle d’attente,
j’ai besoin de la ville, de la rue et de ses visages,
et ceux qui crachent contre la pluie
sont ceux qui n’ont jamais connu la sécheresse
prendre l’ascendant
sur le désir,
ceux qui n'ont jamais goûté
au bénéfice
d'une éclaircie.